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Une récession est inévitable mais la politique économique est là pour limiter la casse : est-ce le moment d’acheter ?

Perspectives de marché 16.03.2020


FLASH MARCHÉS

15 mars 2020

Les perspectives de l'économie mondiale ont radicalement changé au cours des derniers jours à la suite des mises en quarantaine totale ou partielle de la population décidées par plusieurs gouvernements en Europe et aux États-Unis. Il est fort possible que ces mesures soient encore renforcées dans les prochains jours. Les interdictions de voyager, les fermetures d'écoles, d'entreprises ou de commerce sont imposées afin de créer une distanciation sociale, seul moyen de freiner la propagation du coronavirus. L'impact immédiat est une baisse importante du volume et de la productivité du travail, autrement dit une récession. Le coût économique augmentera aussi longtemps que ces mesures seront en place, mais la priorité sanitaire l'emporte, il va sans dire, sur les objectifs économiques.


Dans les circonstances actuelles, la prévision économique est un «work-in-progress», qui doit être constamment mis à jour en fonction de l'évolution exceptionnelle des mar-chés des capitaux et des décisions historiques prises par les gouvernements. 

Certaines choses peuvent être considérées comme ac-quises. Premièrement, il s'agit d'une crise mondiale et non locale contrairement à d'autres épidémies récentes (SRAS, Ebola). Deuxièmement, c'est une crise qui suspend, au moins temporairement, la mondialisation. Les chaînes d’approvisionnement et les voyages sont perturbés, la Chine, l'usine du monde, a dû fermer ses portes pendant plusieurs semaines. Il y a des effets en cascade d'un pays à l'autre. Enfin, il ne s'agit pas d'un choc économique ou financier ordinaire, mais plutôt de ce qu'on appelle un «cygne noir». La vie humaine étant en jeu, cette crise a un fort potentiel de panique, de paranoïa et de sur-réaction. 

Ce qu'on ignore à ce stade est la durée des perturbations économiques. La distanciation sociale est efficace pour freiner l'épidémie mais seulement au bout de plusieurs semaines. La Chine a pris ce type de mesures fin janvier, l'Europe seulement à la mi-mars. Le retour à la vie nor-male s'accompagnera d'un fort rebond de l'activité éco-nomique mais nul ne peut donner exactement sa date. Au mieux, ce ne sera pas avant la fin du printemps.

Trois types d'information peuvent affecter le sentiment des investisseurs sur le court terme.
Premièrement, les nouvelles touchant à l'épidémie elle-même. Il est admis que le pic est loin d'être atteint. À court terme, les gros titres de la presse porteront sur la hausse du nombre de cas et de décès, bref des mauvaises nou-velles qui risquent d'accroître la panique.

Deuxièmement, les données sur l'économie réelle. Les indices de climat des affaires et de confiance des mé-nages ont commencé à se dégrader. Avec des pays en quarantaine, le risque est de voir les faillites et le chômage augmenter. Des chiffres calamiteux seront sans doute publiés dans les prochains mois. C'est une chose de s'at-tendre à une récession, c'en est une autre d'en mesurer l'ampleur et la durée.

Troisièmement, la réaction de politique économique. Sur ce point, on ne peut qu'être impressionné par les décisions récentes des banques centrales et des autorités budgé-taires. La Fed comme la BCE ont clairement fait savoir qu'elles étaient prêtes à intervenir sans limite pour assurer le bon fonctionnement des marchés de capitaux et du secteur bancaire. Il est hors de question de laisser se pro-duire une faillite retentissante, comme celle de Lehman Brothers en septembre 2008. Cette fois-ci, on observe des injections massives de liquidité, une hausse des achats d'actifs, un assouplissement des réglementations s'appli-quant aux banques. Dans l'ensemble, le secteur bancaire est mieux capitalisé et mieux supervisé qu'en 2008. Les autorités budgétaires sont disposées à couvrir le coût des perturbations économiques avec une garantie des prêts, un moratoire sur les impôts, etc. Dans une situation d'ur-gence, il n'y a pas de limite aux déficits publics. La Chan-celière allemande comme le président français ont été très clairs sur ce point. Dans la mesure où la BCE assure des taux ultra-bas, le refinancement de la dette souveraine ne posera aucun problème, même dans les pays déjà très endettés. La réaction des responsables de la politique économique est brutale car il faut stopper la panique des marchés. 

Au total, le choc économique sera sévère mais on a en-core de bonnes raisons de croire qu'il sera transitoire. La crise actuelle n'est pas, selon nous, la répétition de 2008.



Market update

Tout d’abord, il est trop tard pour vendre si vous étiez in-vestis en actifs risqués. La violence et l’ampleur du mou-vement de correction ne favorisent plus d’allègements significatifs

Qu'avons-nous fait ?
Nous avons allégé l'exposition aux actions des porte-feuilles les plus défensifs (par exemple Polaris Moderate de 30 à 20 %) dans un objectif de préservation du capital. Pour les portefeuilles équilibrés, comme l'horizon d'inves-tissement est plus long et la capacité à accepter une volati-lité plus élevée est plus grande, nous avions soit réduit tactiquement la pondération des actions de 8% maximum, soit modifié la sensibilité des portefeuilles en favorisant les sociétés les plus à même de résister à la crise. Ainsi, nous avons réduit les sociétés les plus cycliques et les plus exposées au virus (voyages, loisirs, etc.). 

Du côté du crédit, début février, nous avons vendu toutes nos positions High Yield en prévision d'un possible credit crunch, tant les spreads étaient serrés et ne tenaient pas compte du risque d'un retournement de la croissance. Nous avions augmenté la duration des portefeuilles en donnant la préférence aux obligations Investment Grade, considérant que le soutien des banques centrales et la durée probablement limitée de la crise permettraient d'ab-sorber les chocs des autres actifs.
Du côté des devises, nous avons soldé 75% de nos posi-tions sur le dollar, en tenant compte du fait que la FED avait la plus grande marge de manœuvre (baisses de taux et injections de liquidités).

Que devons-nous faire aujourd'hui ?
Nous restons sous-pondérés, mais nous commençons à racheter une partie de cette sous-pondération (1/3). Seules les entreprises de qualité sont élues, offrant une bonne visibilité sur leurs flux de trésorerie avec des bilans so-lides. Les perspectives de contagion du virus ne permet-tent pas encore un positionnement plus agressif. Les flux d'informations continueront à être anxiogènes dans les semaines à venir, quel que soit le comportement des banques centrales ou des gouvernements. 

Pas de rachat d'obligations High Yield à ce stade, d'autant plus que la chute du prix du baril de pétrole augmente le risque de faillite des producteurs américains de gaz de schiste, qui représentent 13% des indices et pèsent sur le segment. Baisse des taux d'intérêt en raison d'une illiquidi-té marquée, retour à une durée neutre en ligne avec l'hori-zon d'investissement. Exemple 3 ans sur modéré.

Les marchés en Europe sont tombés légèrement en des-sous de la valeur comptable en période de stress extrême sur les marchés des actions. Les marchés américains se sont consolidés en général à 2x la valeur comptable. Donc, si nous pensons qu'il n'y a pas de crise à long terme, nous pouvons penser que nous pouvons acheter à ces niveaux de stress.

Si les marchés des actions continuent à dévier d'environ -10 % par rapport à la clôture de vendredi, nous revien-drons à un positionnement neutre. Les secteurs privilégiés dépendront des mesures prises par les autorités et de l'impact attendu sur la croissance. En fonction des niveaux d'écart, nous serons également tentés de revenir au High Yield.  

Si le marché des actions baisse de 20 % par rapport aux niveaux de vendredi, nous passerons en mode achat avec un positionnement significatif sur les classes d'actifs les plus décotées, dans une perspective d'investissement à long terme. 
Les conditions extrêmes et sans précédent dans les-quelles nous vivons nous obligent à la prudence, mais ne doivent pas nous faire oublier l'essence même de notre métier : détecter les opportunités d'investissement sur le long terme et offrir une création de valeur à nos clients.  Nous vous assurons de la mobilisation totale de tous les gestionnaires de portefeuille. Nous veillerons à communi-quer régulièrement sur l'état de nos portefeuilles ainsi que sur notre compréhension des marchés.  

 

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Bruno Cavalier
Chef Économiste ODDO BHF
Laurent Denize
Global co-CIO ODDO BHF Asset Management
Jan Viebig
CIO ODDO BHF TRUST

 

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